Déchristianisation de la littérature - Chronique littéraire
Publié le 01/07/2018
Elle s’impose parce qu’elle nous touche dans les profondeurs elle interroge à la fois notre rapport au pays corrézien (en l’occurrence le plateau de Millevaches), notre rapport à l’histoire et à l’actualité et surtout celui que nous entretenons avec nos origines, à savoir l’héritage judéo-chrétien de la culture européenne dont l’empreinte est encore (pour combien de temps ?) lisible dans notre culture française et européenne.
Certes, Millet peut déranger et dérouter, surprendre et susciter des réactions diverses mais ne nous faut-il pas entendre le murmure de son dernier livre : ''déchristianisation de la littérature'' ? Dans cet ouvrage où se mêlent la pudeur des mots, l’intimité des émotions, la supplique de la prière comme l’ironie et l’emportement fougueux, il conduit, pas à pas, ses lecteurs vers ces milles sources où littérature et christianisme sont comme le diptyque d’un même et unique retable !
Car, pour Richard Millet, la littérature prend naissance avec la Bible, celle-ci n’étant pas seulement le prétexte d’œuvres en devenir, mais bien une terre d’origine (terre promise !) à partir de laquelle un récit renouvelé est possible, où une histoire peut être racontée et un passé exploré, un avenir envisagé… Une question demeure : y a-t-il un avenir après la littérature ?
Avec modestie, l’auteur s’aventure à ouvrir des chemins de simplicité qui nous renvoient à l’acte créatif : tant qu’il y aura des auteurs et des lecteurs un avenir est espéré.
Ce livre de Richard Millet qu'il ne faudrait pas réduire trop rapidement au rang des nostalgies du passé, nous renvoie à ces questions que posait jadis Ricœur dans « Temps et récit » : qu'en est-il du temps agi et vécu, du temps écrit et lu ? C’est-à-dire de cette « Parole » qui prend forme et corps dans notre histoire et qui fait de nous des vivants....une parole, une narration qui nous informe, qui nous met en forme, qui nous construit... !
Finalement, la question de Richard Millet n’est-elle pas celle-ci : qu'en est-il de cette inouïe aventure de l’existence humaine ? qu'en est-il de cette épopée qui est la nôtre : de notre propre traversée du Sinaï, de notre exode dans le désert, de l’alliance reçue et de la Pâque partagée ? qu'en est-il de la rédemption et du salut ? Voilà le seul sujet et objet qui vaille pour la littérature ! A sa manière Richard Millet nous rappelle que seul l’amour est digne de Foi !
Abbé Nicolas Risso
Richard Millet, « Déchristianisation de la littérature ». Édition Léo Scheer 2018.