Sur les pas de St François d'Assise
Parmi les événe-ments du mois passé, entre le 3 et le 10 octobre, j’en retiens trois pour cet éditorial. Ils sont de natures bien différentes et pourtant quelque chose les a reliés dans mon esprit : la fraternité. Deux de ces événements concernent l’Église universelle et un concerne notre Église diocésaine : le 3 octobre, la promulgation de la 3ème encyclique du Pape François, Fratelli tutti (Tous frères) ; le 10 octobre, la béatification du jeune Carlo Acutis ; et le 9 oc-tobre, le 50e anniversaire de la mort du serviteur de Dieu, Edmond Michelet.
L’encyclique du Saint-Père, signée sur la tombe de saint François d’Assise, est consacrée à la fraternité et à l’« amitié sociale ». L’ensemble des hommes constitue une seule famille : la famille humaine. Mais c’est un défi à relever, car le monde actuel ne va pas bien ; le pape parle des « ombres d’un monde fermé ». La culture du déchet est dénoncée, qui tue les embryons, les vieillards, les pauvres, les migrants. Pour sortir de cette impasse, le pape met au centre le commandement de l'amour du prochain, notamment sur la base de la parabole du bon Samaritain : « Ne demande pas qui est mon prochain, mais fais-toi prochain de tous les autres ! ». C’est ainsi que l’amour devient universel. Par ailleurs, la fraternité exige une réhabilitation du politique qui doit maîtriser un développement économique basé sur le seul profit. Le pape insiste aussi sur la nécessité du dialogue, dans lequel la vérité et le pardon ont toute leur place. Les religions sont au service de cette fraternité. « Sans ouverture au Père de tous, il n’y aura pas de raisons solides et stables à l’appel à la fraternité ». D’où la nécessité de « réveiller les forces spirituelles » pour que naisse partout la véritable fraternité.
Le second événement est ussi lié à Assise, car c’est dans la basilique Saint-François que Carlo Acutis a été béatifié, le 10 octobre. Né en 1991, dans une famille peu pratiquante, Carlo n’a cherché qu’une seule chose dans sa courte vie : l’amitié avec Jésus. Le jour qui a le plus marqué sa vie est celui de sa première communion, à l’âge de 7 ans. À partir de ce jour-là, il ira à la messe tous les jours de sa vie et y entraînera de nombreuses personnes. Il disait :« l’eucharistie, c’est mon autoroute pour aller au ciel ». À l’âge de 14 ans, il s’engage dans sa paroisse comme catéchiste pour les plus petits. Très doué en informatique, il utilise ses talents pour réaliser une exposition sur les miracles eucharistiques afin de transmettre sa foi en la Présence réelle du Christ dans l’eucharistie. Il a aussi un lien très fort avec la Sainte Vierge Marie. Grâce à sa grand-mère et d’autres personnes âgées, il découvre la prière du chapelet qui ne le quitte plus. Il vit une charité fra-ternelle intense auprès de ses proches, de ses amis, des pauvres, des immigrés du quartier de Milan où vit sa famille. En octobre 2006, il meurt d’une leucémie foudroyante. Il est inhumé à Assise, selon ses volontés.
Le troisième événement est le 50e anniversaire de la mort d’Edmond Michelet, le 9 octobre 1970, à Brive. Toute sa vie, il a été animé d’une foi chré-tienne qui n’a jamais vacillé, même dans les plus dures épreuves, comme celle de sa déportation à Dachau qui dura deux ans. Engagé dans la vie politique où il exerça des fonctions importantes – député, sénateur, ministre plusieurs fois –, on a dit de lui qu’il était « un homme d’État franciscain » (Joseph Rovan). Ce qui autorise cette expression, c’est bien son sens profond de la fraternité uni-verselle, à l’exemple du Poverello d’Assise, qui lui valut bien des critiques venant de tous bords. Dans sa famille, sa profession, ses engagements dans la jeunesse chrétienne, au camp de Dachau, et dans ses responsabilités politiques, il fut à sa manière, un bon Samaritain, celui qui ne détourne pas son regard devant les blessés de la vie. Où puisait-il sa force ? Dans l’eucharistie (il participait chaque jour à la messe) et dans la prière, notamment la récita-tion du Rosaire. Un mot revenait sans cesse sur ses lèvres : caritas.
+ Francis BESTION, Évêque de Tulle